Axiom’s End

Cora est une jeune femme coincée et perdue tant sur le plan de sa carrière que sur le plan de la parenté. Vivant avec sa mère — avec qui elle entretient une relation tendue –, son frère, sa soeur et ses deux chiens, sa situation familiale n’est pas des plus enviables. En effet, son père Nils, un sonneur d’alerte réputé à la Edward Snowden, est en fuite. Lors de la chute d’une météorite survenue quelques années auparavant, il avait fait couler des documents qui prouvent supposément que le gouvernement cache la présence d’agents extra-terrestres sur Terre. De ce fait, Cora et sa famille sont en surveillance constante par le FBI. Pas exactement le genre de milieu où une jeune fille peut pleinement s’épanouir.

Axiom’s End est le premier roman de science-fiction de la YouTubeuse Lindsay Ellis. L’écrivaine qui roule principalement sa bosse dans la critique et l’analyse de la culture populaire — avec une nette préférence pour les Disney et les films chantés — signe ici un ouvrage qui se lit bien en dépit d’un manque de surprise. Ceux qui suivent sa chaîne se rappelleront d’une vidéo faisant une analyse comparative entre Independence Day de Roland Emmerich et War of The Worlds de Steven Spielberg. Dire qu’Axiom’s End tient ses inspirations de ces deux films serait un euphémisme. Le roman a au moins le mérite d’être moins bête que le premier et plus avenant que le second dans le traitement des extra-terrestres. Car oui, des êtres venus d’ailleurs, Axiom’s End en met en scène dès que possible avec Ampersand en tête, le personnage le plus important de l’intrigue après Cora.

La force d’Axiom’s End se trouve justement dans le traitement des ET. Lindsay Ellis parvient avec aisance à expliquer à la fois le mode hiérarchique qui prédomine chez cette nouvelle forme de vie ainsi qu’un système de langage à la fois simple et complexe à mi-chemin entre l’organique et l’informatique. Les chapitres où il est question de comprendre cette nouvelle race, leur raison d’être et d’explorer le développement d’un moyen potentiel de communication avec les divers acteurs du gouvernement sont de loin les plus intéressants. L’écrivaine s’applique à en faire de véritables entités mystérieuses et pousse la difficulté jusqu’à éviter de leur donner des traits précis pour justifier l’impensable.

Pour ce qui est des humains, le livre va tourner bien évidemment autour de Cora, son rapport complexe avec un père qui lui est étranger, ainsi que les agents gouvernementaux avec qui elle doit travailler contre son gré. Cette portion du livre n’est pas mauvaise en soi, mais vit malencontreusement dans l’ombre des liens tissés entre Cora et Ampersand. On sent d’ailleurs que cette partie est très personnelle pour la YouTubeuse; celle-ci ayant déjà évoqué la perte de son propre père dans ses vidéos. Sans compter le fait de situer l’action dans une version alternative de 2007, à une époque où la jeune écrivaine se cherchait encore.

Axiom’s End demeure donc un récit typique sur un premier contact aux rebondissements connus. On aurait aimé peut-être laisser tomber le côté familial pour faire grandir davantage Cora à travers son rapport avec Ampersand. Explorer également plus en profondeur les questions « Qu’est-ce qu’un extra-terrestre? » et « Comment le décrire? ». Sans doute que Lindsay Ellis, pour faire honneur à Emmerich et Spielberg, voulait éviter de trop s’aventurer dans le sci-fi hardcore. À tout le moins, la prose a le mérite de rester engageante du début à la fin.

Pour ceux qui ont été élevés au biberon d’Isaac Asimov ou d’Ursula Le Guin, Axiom’s End n’apportera pas grand-chose. Pour les autres qui apprécient les analyses de Lindsay Ellis, il constitue un excellent point de départ dans son imaginaire littéraire et présage de bonnes choses pour la suite.

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